La collégiale Saint-Taurin de La Ferté

a date généralement avancée pour la construction de l’église collégiale Saint-Taurin est 1164. Hervé Ier de Vierzon, chevalier de La Ferté, aurait fait construire le bâtiment après son retour des croisades. Cette date est erronée : il existe un acte daté de 1032 mentionnant le don de la collégiale à la puissante abbaye de Micy-Saint-Mesmin.

L’installation des chanoines remonte en fait à l’époque d’Humbault le Riche et Geoffroy de Vierzon, fils du fondateur de La Ferté Imbault, Humbault le Tortu. Elle a été voulue par un clerc dénommé Herbert.

À cette époque, la France ne compte pas assez de prêtres pour assurer le soutient moral et spirituel des habitants. Des communautés de chanoines sont donc installées, notamment dans les campagnes, pour pallier ce manque. Ces religieux peuvent en effet assurer la tenue des messes et des actes religieux les plus courants. Lorsque le chapitre collégial Saint-Taurin est installé près de la jeune forteresse d’Humbault, il est intégré dans la paroisse voisine de Selles-Saint-Denis

Le bâtiment originel est vraisemblablement en bois, matériau peu cher et abondant à l’époque. Sa reconstruction en pierres doit être relativement rapide : le porche qui subsiste encore aujourd’hui est daté du XIIe siècle.

Le portail de l'ancienne collégiale saint-taurin, aujourd'hui entrée de la chapelle Saint-Taurin
Le portail de l’ancienne collégiale, aujourd’hui entrée de la chapelle Saint-Taurin

En 1164, l’église abrite une communauté de huit chanoines séculiers. Ceux-ci sont propriétaires de l’île Saint-Taurin qui est alors plus étendue et qui constitue sa première source de revenus. Au XIIe siècle, ils acquièrent le droit de tenir des foires périodiques et d’en percevoir les fruits. Si la collégiale dépend toujours de l’église de Selles-Saint-Denis, on compte parmi ses possessions propres de nombreuses maisons et bâtiments dans le bourg et dans les villages voisins sur lesquels elle touche des redevances et des impôts. Elle possède également plusieurs familles serves jusqu’au XIVe siècle.

Certaines sources font état d’une première destruction du bâtiment par les troupes anglaises du Prince noir en 1356, pendant la guerre de Cent ans. Cette information peut être discutée : La Ferté ne figure pas dans les sources d’époque mentionnant les ravages du prince de Galles. La destruction de l’église lors des guerres de religion en 1562 est avérée : il existe même des témoignages directs des chanoines réfugiés dans le bourg voisin de Souesmes. Le clocher semble être un des seuls éléments encore debout après la dévastation.

La reconstruction de la collégiale est lancée par Jacques d’Estampes marquis de La Ferté-Imbault au XVIIe siècle. En 1628, l’ensemble Saint-Taurin est terminé. Une chapelle a été ajoutée pour le châtelain : la chapelle Saint-Taurin. On dispose de peu d’informations sur le nouveau bâtiment : si sa configuration est connue – une nef et un transept incomplet formé par la chapelle – il ne reste que peu d’éléments mobiliers et très peu de descriptions permettent de décrire précisément son intérieur.

Au XVIIIe siècle, les chanoines étant devenus moins nombreux, le chapitre est clos en 1742. C’est la fin d’une longue présence à La Ferté-Imbault. C’est également le départ d’une institution qui était un des poumons économiques de la petite ville.

Après la Révolution, Abel-Alexis-François Leconte Nonant de Pierrecourt, châtelain et ancien seigneur de La Ferté-Imbault, paie lui-même un desservant pour l’ancienne collégiale. L’église est utilisée jusqu’en 1807, année où le marquis de Pierrecourt vend son domaine.

Le bâtiment est abandonné, les Fertois doivent se rendre au siège de la paroisse à laquelle ils ont toujours appartenu : Selles-Saint-Denis. Il faut attendre l’érection de Saint-Taurin en paroisse en 1841 pour pouvoir assister de nouveau aux messes dans l’ancienne collégiale.

Collégiale saint taurin
L’ancienne collégiale en 1832

Après l’indépendance de la commune fertoise en 1860, l’église collégiale Saint-Taurin est reconnue vétuste et dangereuse suite au manque d’entretien. Elle doit être restaurée ou détruite. L’abbé Jean-Léon Bommer bataille dur pour conserver le bâtiment qui est également fréquemment inondé du fait de sa proximité avec la Sauldre. Malgré plusieurs projets de restauration, elle est détruite en 1868. Un nouveau lieu de culte est finalement construit en face du château qui abrite alors un ministre anglican, M. Robert Kirby. Pour financer les travaux de construction, les matériaux du vieil édifice sont vendus par adjudications.

De l’ancienne collégiale, ne sont conservés que le porche roman et deux chapiteaux en pierre sculptée. C’est une petite victoire pour l’abbé Bommer qui a également pu sauvegarder la chapelle de Jacques d’Estampes. Une partie du mobilier des XVII et XVIIIe siècles est également sauvée et placée dans la nouvelle église à l’entrée du bourg.

 

La collégiale Saint-Taurin, d’après les plans de restauration de l’archictecte G. Poupard

Illustration : SAUSSAYE Louis (de) in Album blésois, CDPA41; disponible sur le site du CDPA41/SEGRET Tristan, La Collégiale d’après l’architecte G. Poupard