Le bourg de La Ferté-Imbault

Le bourg de La Ferté-Imbault est intimement lié à l’histoire de son château : le nom même du village « Firmitas Humbaldi » fait référence au fort construit par Humbault le Tortu à la fin du Xe siècle, probablement vers 980.

L’approvisionnement du tout jeune château nécessite la présence d’un bourg, et celui de Selles-Saint-Denis, déjà existant, est trop éloigné. Pour attirer une population près de « La Ferté », les fils d’Humbault, Humbault le Riche et Geoffroy de Vierzon, autorisent dès le début du XIe siècle la création d’un chapitre collégial sur une île de la Sauldre : la collégiale Saint-Taurin est construite. Avec cette présence ecclésiastique près du fort, toutes les conditions sont réunies pour permettre l’émergence d’un village.

Au XIIe siècle le seigneur du lieu est Hervé Ier de Vierzon. Son fils Guillaume permet de tenir des foires périodiques, foires qui subsisteront jusqu’à la fin des années 1800.

Extrait de Thaumas de la Thaumassière : Hervé Ier
Extrait de Thaumas de la Thaumassière : Hervé Ier

Sous la houlette des seigneurs locaux, une bourgade prospère se développe au pied de la forteresse. En plus de ses lieux de culte (avec, entre autres, la collégiale, l’église Saint-Nicolas et la chapelle de la Maladrerie), elle compte de nombreux commerces et industries parmi lesquels des moulins à blé et à foulon sur le cours de la Sauldre, des tanneries, des ateliers de drapiers, des parchemineries et des forges. De nombreux agriculteurs sont également présents pour satisfaire les besoins en nourriture. Pour tirer un maximum de profits des échanges, la petite ville met en place une coutume appelée Boutaige. Les religieux de Saint-Taurin ne sont pas en reste puisqu’ils touchent de nombreux droits notamment ceux des foires annuelles. Le servage, qui a cours jusqu’à tardivement, fait également partie des privilèges des grands de La Ferté. Pour protéger la population et les infrastructures, des talus et des fossés sont mis en place : on compte alors cinq enceintes à La Ferté-Imbault.

Ces défenses -sont-elles en partie maçonnées ?- ne suffisent pourtant pas à contenir les troupes qui ravagent le pays durant la guerre de Cent ans. Si aucune preuve ne démontre la venue du Prince noir au village, le bourg semble néanmoins avoir souffert des pillages anglais, écossais mais aussi français. La seigneurie qui répondait directement au comte de Blois au Moyen Âge – preuve de son importance d’alors – est une des plus appauvries de la région à l’aube du XVe siècle.

Le second coup dur pour La Ferté-Imbault a lieu lors des guerres de religion quand en 1562 les troupes protestantes incendient le village. Le château et les édifices religieux sont ruinés, seules quelques maisons subsistent encore.

blason d'estampes
La blason de la maison d’Estampes

La seigneurie, qui est passée par plusieurs familles, est alors aux mains de Claude d’Estampes, originaire de Salbris. À la mort de ce dernier Jeanne de Hautemer, sa femme, et Jacques leur fils et héritier se lancent dans la restauration du château et des lieux de culte. Jacques d’Estampes est très attaché à cette possession solognote et lui permet de retrouver un faste et une richesse proche de ceux du Moyen Âge. Grâce à ses exploits militaires, il fait ériger La Ferté en marquisat. Les terres dépendant du marquis d’Estampes s’étendent de Loreux à Souesmes et de Saint-Viâtre jusqu’aux limites de Theillay. La petite ville est également le siège des cours de Haute et Basse justice et rassemble un certain nombre de représentants des charges juridiques et administratives.

La Ferté-Imbault appartient à la maison d’Estampes jusqu’à la moitié du XVIIIe siècle, où elle est acquise par les Nonant de Pierrecourt. Depuis l’époque du maréchal de La Ferté, Jacques d’Estampes, le domaine a été divisé et le village est devenu moins riche, surtout après le départ du chapitre collégial. Néanmoins, le dernier seigneur du village, Abel-Alexis-François Leconte de Nonant, arrive à rassembler d’anciens domaines et métairies et à donner un dernier éclat au village.

La situation se dégrade énormément pour le bourg après la Révolution : le village est en effet rattaché à la commune voisine de Selles-Saint-Denis en tant que simple section. La Ferté n’est plus chef de son administration et seule une société de notables existe pendant quelques années pour servir de référent local. La section locale doit aussi, en plus de batailler avec la mairie selloise, se défendre contre les châtelains qui tentent de récupérer des terres et des bâtiments communaux restés indivis après la Révolution. La défense est inefficace puisqu’en 1830 les halles sont détruites par le propriétaire anglais du château.

Si la commune retrouve son indépendance en juin 1860, après une longue bataille avec l’administration de l’époque, elle doit faire face aux nombreux problèmes financiers qui affectent le bourg. Il lui faut en effet assumer les frais d’entretien de nombreux bâtiments, le paiement des agents communaux et régler les honoraires de justice pour les procès qu’elle intente pour conserver ses intérêts face aux grands propriétaires et à la commune de Selle-Saint-Denis. C’est durant cette époque difficile que l’ancienne collégiale est détruite et que le bourg se retrouve amputé du champ de foires au profit du château.

La fin du XIXe marque néanmoins la période des grands projets : construction d’une nouvelle église dans le bourg, de ponts sur la Sauldre et d’un bureau pour le télégramme. Ce désenclavement est lié à l’émergence de plusieurs grandes figures : notamment François-Ferdinand Herveau, premier maire de la commune, Jean-Léon Bommer, curé et Auguste Fresson, propriétaire du château puis maire.

Ces travaux sont complétés par la création d’une gare, sur la toute nouvelle ligne du Blanc-Argent, et d’un bureau de poste installé sur la place du village. Ce dernier facilite la vie des Fertois et apparait aussi comme une victoire administrative. En effet, on reprochait (à tort ?) au voisin sellois d’avoir manigancé pour obtenir son bureau et priver La Ferté d’un établissement semblable pendant des années.

En 1895, la mairie de La Ferté-Imbault commence à préparer les travaux  de la mairie-école. Le bâtiment est inauguré en 1900. À partir de cette époque, La Ferté-Imbault n’a plus d’autres grands projets à mener et commence à devenir un petit village endormi.

Comme dans beaucoup de villages français, la guerre de 1914-1918 fauche de nombreux Fertois. Elle a aussi une conséquence plutôt inattendue : un camp de munitions est installé à Salbris à partir de 1916. Il fournit assez rapidement du travail aux soldats rentrés du front.

La modernisation continue dans les années 1920 avec la rénovation de la voirie : on construit les premiers trottoirs et caniveaux du bourg. Le passage, près du village, d’une nouvelle ligne haute tension pour alimenter Romorantin permet l’électrification de La Ferté en 1925.

Dans les années 1930, la commune profite de l’installation de l’usine de munitions sur son territoire et celui de Salbris pour construire des habitations destinées aux ouvriers. L’ancien foyer municipal et l’école des filles Raymond Bordes – maire et conseiller général de Loir-et-Cher – datent de cette même période.

L'inauguration du foyer municipal
L’inauguration du foyer municipal en 1937

Pendant l’occupation, les troupes allemandes réquisitionnent plusieurs habitations dont le château et une partie de l’école Raymond Bordes. Une grande rafle a lieu au camp de munitions de Michenon et de nombreuses personnes sont envoyées en Allemagne pour le service du travail obligatoire. En 1944, le camp est bombardé par les Alliés. Le souffle des explosions occasionne des dégâts jusque dans le bourg : toitures abîmées, vitres brisées, etc.  Les travaux de restauration des écoles, de la mairie, du foyer municipal et de l’église sont entrepris dès la Libération.

La seconde moitié du XXe siècle débute avec l’installation d’un stade municipal dont le terrain est acheté en 1950.

En 1960, une grande manifestation est organisée pour célébrer le Centenaire de l’Indépendance. Le comité des fêtes, qui est créé à cette occasion, a préparé avec la mairie et le châtelain, M. Bertrand, des réjouissances sur deux jours avec notamment une intervention de Madeleine Sologne et un concert des Compagnons de la Chanson.

Les infrastructures du village se modernisent encore : les deux nouveaux ponts de l’île Saint-Taurin sont inaugurés en 1962 et un réseau tout à l’égout est construit à partir de 1975. L’étang communal est quant à lui creusé un an plus tard. En 1981, c’est la nouvelle salle des fêtes qui est construite, l’actuelle salle Madeleine Sologne. La place des tilleuls et le square Bernard Rohmer sont aménagés au tout début des années 1990.

En 1995-1996, un regroupement pédagogique des écoles de Selles-Saint-Denis et de La Ferté-Imbault est mis en place afin de mutualiser les dépenses. La grande rivalité entre les deux communes voisines n’est plus qu’un lointain souvenir et les jeunes têtes blondes des deux villages deviennent des camarades de classe et de jeux.

Au tournant du nouveau millénaire, la municipalité de M. Daniel Ville lance les travaux d’un gymnase.

Illustrations : THAUMAS DE LA THAUMASSIERE, Histoire du Berry; Inauguration du foyer municipal, collection privée.

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